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S-Bahn Berlin

Quels enseignements tirer des S-Bahn Allemands ?

Photo : S-Bahn à Berlin (Source : deposit Photo)
Le S-Bahn de Berlin est le premier S-Bahn inauguré en Allemagne dès 1924.

 

Les S-Bahn allemands, ou « Stadtschnellbahn », sont souvent cités comme des exemples de succès en matière de transport urbain et régional. Ces derniers se sont développés en Allemagne au début du 20ème siècle pour répondre aux besoins croissants de mobilité urbaine. Le premier réseau de S-Bahn a été inauguré à Berlin en 1924, marquant ainsi le début d’une nouvelle ère dans le transport public. Celui de de Hambourg a suivi dix ans plus tard. Le premier S-Bahn « moderne », tel qu’on le connait aujourd’hui, est inauguré à l’occasion des Jeux olympiques de 1972 à Munich. Depuis, le concept s’est généralisé dans la quasi-totalité des grandes villes allemandes, chaque réseau apportant ses spécificités et innovations.

Afin d’en tirer des enseignements pour la France, nos bureaux de Berlin et de Paris ont analysé les principales caractéristiques des S-Bahn allemands et les raisons de leur succès pour en tirer des enseignements pour les SERM français.

 

1) Les conditions de succès des S-Bahn en Allemagne :

 

6 caractéristiques majeures du service

Cadencement élevé : les trains circulent à intervalles réguliers, sans baisse de l’offre en heures creuses, proposant ainsi un service fiable tout au long de la journée. La cadence de base varie selon les réseaux : elle est généralement de 20 minutes, passant à 30 minutes en soirée et les weekends. Une tendance se dessine au niveau de l’Allemagne : une cadence de 15 minutes en journée et 30 minutes en grande banlieue, mieux adaptée aux trains régionaux utilisant les mêmes voies. Par superposition de lignes, la fréquence sur un tronçon commun dans les zones denses peut être très élevée, atteignant par exemple 2 à 2,5 minutes à Munich, Francfort ou Stuttgart, et 3,3 minutes à Berlin ou Hambourg.

Amplitude horaire : le service fonctionne généralement comme un transport urbain, de 5h00 à 1h00, avec une heure supplémentaire, voire un service continu toute la nuit, les vendredis et samedis soir.

Desserte fine en zone dense : les arrêts sont très rapprochés, parfois espacés de seulement 1,5 km, et les services fonctionnent sur les tronçons comme une ligne de métro.

Interconnexion des réseaux : grâce à leur emplacement et à la conception de leurs infrastructures, les arrêts des S-Bahn sont étroitement interconnectés avec les lignes de métro, tram et bus des réseaux urbains, créant pour les usagers l’impression d’un réseau unique et intégré. Des parkings à vélos sont systématiquement disponibles dans les gares du réseau.

« Promesse de qualité » : la ponctualité et la fiabilité des S-Bahn inspirent confiance aux usagers, constituant des éléments essentiels pour un système de transport public efficace. Pour les Allemands, le signe « S-Bahn » est synonyme de ces qualités, largement respectées à quelques rares exceptions.

Tarification Unique (Verbundstarif) : les réseaux S-Bahn sont systématiquement intégrés dans une tarification unique, valable pour l’ensemble des modes de transport de l’agglomération. Cette caractéristique est considérée comme indispensable, car, si le mode ferroviaire est pertinent pour les distances plus longues, la desserte fine des centres-villes se fait naturellement par les modes urbains. L’obligation d’acheter un deuxième billet rendrait le changement de modes peu attractif et perturberait les correspondances courtes. Par exemple, à Cologne, la première ligne de S-Bahn est restée assez vide jusqu’à la création du « Verkehrsverbund » (communauté tarifaire) quelques années plus tard, qui a mis en place une harmonisation tarifaire et billettique.

 

Infrastructure et exploitation :

Infrastructures modernisées et adaptées : les S-Bahn utilisent principalement les infrastructures existantes, remises à niveau pour répondre aux normes S-Bahn, incluant l’électrification, l’ajout de voies doubles, la construction de quais hauts et l’amélioration de l’accessibilité. De nouveaux arrêts sont créés ou déplacés en périphérie pour augmenter la proximité avec les usagers. Les tronçons centraux exigent souvent des voies dédiées, surtout en souterrain dans les gares terminales majeures, bien que certaines lignes parallèles aux voies existantes soient utilisées. À l’inverse, les réseaux S-Bahn de villes comme Brême ou Magdeburg, disposant de réseaux moins contraints, n’ont pas de voies spécifiquement réservées.

Ainsi, les réseaux S-Bahn se divisent en quatre types :

  1. Réseaux historiques entièrement en site propre, comme à Berlin et Hambourg.
  2. Réseaux avec un tronçon central spécifiquement dédié, présents à Munich, Francfort, Stuttgart, Cologne, et autres.
  3. Réseaux avec un tronçon central dédié en spécifiant les voies existantes, sans investissements majeurs, comme dans le Rhin-Ruhr et à Brême.
  4. Réseaux ressemblant davantage à des trains régionaux, mais labellisés S-Bahn, avec une cadence de 30 minutes, Magdeburg.

Diamétralisation des lignes : les lignes S-Bahn ont rarement leur terminus à la gare centrale, mais la traversent, ce qui permet une exploitation plus efficace et sans forcément construire de nouvelles infrastructures.

Exploitation efficace : le système S-Bahn optimise l’exploitation grâce à un cadencement systématique, maximisant le service avec des coûts d’exploitation réduits, grâce à des horaires et infrastructures optimisés pour des temps retournements des trains courts. Le matériel roulant est conçu pour des arrêts fréquents, avec une forte capacité d’accélération, ce qui permet d’offrir des trajets fréquents et attractifs, plutôt que de maximiser la capacité en termes de voyageurs de chaque train.

 

2) Enseignements pour les SERM Français

 

En nous inspirant de la réussite du modèle de S-Bahn allemand nous pouvons tirer plusieurs enseignements pour les SERM français :

  1. Adopter une offre inspirée des transports urbains avec une cadence élevée et continue, une amplitude comparable, et des arrêts rapprochés.
  2. Renforcer l’intermodalité avec les autres modes de transport urbain et le vélo, intégrant cette connectivité au niveau du bâti, des lignes et des horaires.
  3. Optimiser les infrastructures pour une exploitation efficace, favorisant des arrêts rapides et une forte interconnexion avec les lignes urbaines existantes.
  4. Prioriser l’optimisation des plans de voie, des signalisations, etc., avant d’envisager d’en créer nouvelles, comme une première étape pragmatique pour susciter l’adhésion des citoyens et des politiques.
  5. Adapter et repositionner les arrêts, y compris en banlieue, pour intégrer pleinement les zones de chalandises.
  6. Utiliser du matériel roulant adapté aux exigences d’un service avec des arrêts fréquents.
  7. Établir un organisme centralisé (le Verkehrsverbund, cf. ci-dessus) assurant une tarification intégrée, une planification du réseau et des horaires cohérents, ainsi que des correspondances efficaces en temps réel, clé essentielle du succès.
  8. Faire de la marque SERM une garantie de qualité, en maintenant les standards élevés promis aux usagers.

 

 

Auteur

portrait noir et blanc Andreas Wettig

Andreas Wettig

LJG

Lila-Maud Judic-Gilot

Date

25 septembre 2024

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